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En ce 11 novembre où nous commémorons l’anniversaire de l’armistice de la première guerre mondiale, cette épouvantable boucherie qui laissa sur le carreau plus de 10 millions d’hommes, je pense à cette phrase inscrite sur le célèbre monument aux morts de la commune de Gentioux, dans la Creuse : « que maudite soit la guerre ! ». Exclamation soulignée par le poing rageur d’un enfant orphelin.

En ce 11 novembre, je pense à mes grands-pères : Alexandre, né en 1892, conscrit en 1913 et qui ne fut démobilisé qu’en 1919, après avoir traversé l’horreur de Verdun et perdu les plus belles années de sa jeunesse dans les tranchées ; Marcel, né en 1902, trop jeune pour être mobilisé mais qui devint communiste par haine de la guerre après un meeting du député et ancien combattant Paul Vaillant-Couturier en 1919 à Beauvais.

En ce 11 novembre, je pense à mes grands-oncles : Fernand, employé au gaz, d’abord réformé car malade puis mobilisé en 1916 et qui mourut quelques mois plus tard, dans les montagnes vosgiennes, à l’Hartmannswillerkopf laissant une veuve enceinte d’un fils qu’il ne connut jamais ; Juste, qui revint gazé et puis Marius et Fernand qui laissèrent eux-aussi une partie de leur jeunesse dans cette tragédie.

En ce 11 novembre, je pense aux 719 jeunes soldats beauvaisiens morts entre 1914 et 1918, terrible saignée pour une petite ville de 20 000 habitants à l’époque. Et j’ai souvent emmené mes filles au gré de villages où nous passions, regarder les monuments aux morts et décompter ensemble le nombre énorme de ces vies fauchées en pleine jeunesse.

En ce 11 novembre, je pense aux 100 000 soldats qu’on fit venir des colonies françaises, du Maghreb, d’Afrique noire, d’Indochine et qui laissèrent leur vie dans la boue et le froid des tranchées : en ces temps troubles où l’on entend parfois des discours qui font froid dans le dos, il est bon de se rappeler qu’à l'époque, on ne leur demanda pas s'ils « parlaient bien français » ou s'ils étaient « blancs et chrétiens » et si ils « étaient suffisamment intégré » pour les envoyer dans les tranchées, « défendre la France ». Leur « intégration » s'est faite dans les cimetières et ceux qui rentrèrent n’eurent jamais droit qu’à des pensions misérables, formidable mépris de l’état colonial envers les « indigènes » comme on les appelait …

En ce 11 novembre, je pense aux « fusillés pour l’exemple », tous ces soldats épuisés ou révoltés et victimes de la répression militaire de leur propre armée : il est grand temps qu’ils soient tous réhabilités et leur nom inscrit sur les monuments aux morts de notre pays et il est incroyable que François Hollande tergiverse aussi sur cette question contrairement à ses engagements passés.

En ce 11 novembre, je pense enfin – j’aurais dû dire d’abord - à Jean Jaurès, le tribun socialiste – quand ce mot avait encore un sens -, assassiné le 31 juillet 1914 pour son combat inlassable pour la Paix et pour empêcher la guerre, par un fanatique d’extrême-droite (qui sera acquitté plus tard !). Jaurès qui avait vu avec lucidité que « le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage », phrase d’une totale actualité quand on regarde cette multitude de conflits entretenus d’un bout à l’autre de la planète, pour soumettre des peuples, s’approprier des matières premières, contrôler des passages stratégiques, vendre des armes et des technologies guerrières de plus en plus perfectionnées, le tout au profit de grands groupes multinationaux et de leurs actionnaires.

« On croit mourir pour la Patrie, on meurt pour les industriels » dira en 1922 l’écrivain Anatole France, dans le journal « l’Humanité » fondé par Jaurès. Près de 100 ans plus tard, selon l’Institut international de Stockholm d’études pour la paix, ce sont 1740 milliards de dollars qui ont été consacrés au commerce d’armes dans le monde entier en 2011, un chiffre en forte hausse depuis 20 ans : décidément les « marchands de canon » comme on disait en 1914, se portent mieux que jamais !

  • Tout cela fonde mon engagement total contre la course aux armements et pour un désarmement progressif et négocié, contre les logiques de guerre et pour le recours aux solutions politiques, pour une éducation à la Paix, pour une humanité qui consacrerait enfin toutes ses énergies au partage des richesses, des connaissances et des pouvoirs, pour faire enfin vivre un monde sans armes et sans guerres.

Pour que se réalise enfin le commandement biblique : « tu ne tueras point ! ».

Jaurès disait : « L’histoire enseigne aux hommes la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements, mais elle justifie l’invincible espoir. »

Je partage cet « invincible espoir » d’un monde de paix, d’un monde où triompherait « l’humain d’abord ».

Le célèbre monument aux morts de Gentioux dans la Creuse avec son inscription pacifiste.

Le célèbre monument aux morts de Gentioux dans la Creuse avec son inscription pacifiste.

Cimetière militaire de la rue d'Amiens à Beauvais.

Cimetière militaire de la rue d'Amiens à Beauvais.

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